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et en semblants. Cela je crois et croirai toute ma vie. » Et la dame répondit :

« Guillaume, je vous dis que si Dieu m’aide que jà ne serez par moi trompé, et que vos pensers ne seront pas vains ni perdus. » Et elle étendit les bras et l’embrassa doucement dans la chambre où ils étaient tous deux assis, et ils commencèrent leur druerie[1] ; et il ne tarda guère que les médisants, que Dieu ait en ire, se mirent à parler et à deviser de leur amour, à propos des chansons que Guillaume faisait, disant qu’il avait mis son amour en madame Marguerite, et tant dirent-ils à tort et à travers que la chose vint aux oreilles de monseigneur Raymond. Alors il fut grandement peiné et fort grièvement triste, d’abord parce qu’il lui fallait perdre son compagnon-écuyer qu’il aimait tant, et plus encore pour la honte de sa femme.

» Un jour il arriva que Guillaume s’en était allé à la chasse à l’épervier avec un écuyer seulement ; et monseigneur Raymond fit demander où il était ; et un valet lui répondit qu’il était allé à l’épervier, et tel qu’il le savait ajouta qu’il était en tel endroit. Sur-le-champ Raymond prend des armes cachées et se fait

  1. A far all’amore.