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la cérémonie qui fut fort longue, daigna lui pardonner ; il fut réintégré dans toutes les douceurs de son premier bonheur. L’histoire dit qu’ils passèrent ensemble de longues et heureuses années. Il est sûr que les deux ans de malheur prouvent une passion véritable et l’auraient fait naître quand elle n’eût pas existé avec cette force auparavant.

Vingt anecdotes que je pourrais citer montrent partout une galanterie aimable, spirituelle et conduite entre les deux sexes sur les principes de la justice ; je dis galanterie, car en tout temps l’amour-passion est une exception plus curieuse que fréquente, et l’on ne saurait lui imposer de lois. En Provence, ce qu’il peut y avoir de calculé et de soumis à l’empire de la raison était fondé sur la justice et sur l’égalité de droits entre les deux sexes, voilà ce que j’admire surtout comme éloignant le malheur autant qu’il est possible. Au contraire, la monarchie absolue sous Louis XV, était parvenue à mettre à la mode la scélératesse et la noirceur dans ces mêmes rapports[1].

Quoique cette jolie langue provençale,

  1. Il faut avoir entendu parler l’aimable général Laclos, Naples, 1802. Si l’on n’a pas eu ce bonheur, l’on peut ouvrir la Vie privée du maréchal de Richelieu, neuf volumes bien plaisamment rédigés.