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Ce commerce de tous les instants, serait gênant en France, où il est nécessaire de porter dans le monde une certaine affectation, et où votre maîtresse vous dit fort bien : Monsieur un tel, vous êtes maussade ce soir, vous ne dites rien. En Italie il ne s’agit que de dire à la femme qu’on aime tout ce qui passe par la tête, il faut exactement penser tout haut. Il y a un certain effet nerveux de l’intimité et de la franchise provoquant la franchise, que l’on ne peut attraper que par là. Mais il y a un grand inconvénient ; on trouve que faire l’amour de cette manière paralyse tous les goûts et rend insipides toutes les autres occupations de la vie. Cet amour-là est le meilleur remplaçant de la passion.

Nos gens de Paris qui en sont encore à concevoir qu’on puisse être Persan, ne sachant que dire, s’écrieront que ces mœurs sont indécentes. D’abord je ne suis qu’historien, et puis je me réserve de leur démontrer un jour, par lourds raisonnements, qu’en fait de mœurs, et pour le fond des choses, Paris ne doit rien à Bologne. Sans s’en douter, ces pauvres gens répètent encore leur catéchisme de trois sous. 12 juillet 1821. — À Bologne il n’y a point d’odieux dans la société. À Paris, le rôle de mari trompé est exécrable, ici (à Bologne) ce n’est rien, il n’y a pas de maris