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quand on a quelque chose à dire pour le service d’une passion, mais rarement l’on parle pour bien parler et sur tous les sujets venus.

5o Le ridicule n’existe pas en Italie.

En France nous cherchons à imiter tous les deux le même modèle et je suis juge compétent de la manière dont vous le copiez[1]. En Italie je ne sais pas si cette action singulière que je vois faire ne fait pas plaisir à celui qui la fait, et peut-être ne m’en ferait pas à moi-même.

Ce qui est affecté dans le langage ou dans les manières à Rome, est de bon ton ou inintelligible à Florence qui en est à cinquante lieues. On parle français à Lyon comme à Nantes. Le vénitien, le napolitain, le génois, le piémontais sont des langues presque entièrement différentes et seulement parlées par des gens qui sont convenus de n’imprimer jamais que dans une langue commune, celle qu’on parle à Rome. Rien n’est absurde comme une comédie dont la scène est à Milan, et dont les personnages parlent romain. La langue italienne beaucoup plus faite pour être chantée que parlée, ne sera soutenue contre la clarté française qui l’envahit que par la musique.

  1. Cette habitude des Français diminuant tous les jours, éloignera de nous les héros de Molière.