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CHAPITRE XLVIII

De l’amour allemand.


Si l’Italien, toujours agité entre la haine et l’amour, vit de passions, et le Français de vanité, c’est d’imagination que vivent les bons et simples descendants des anciens Germains. À peine sortis des intérêts sociaux les plus directs et les plus nécessaires à leur subsistance, on les voit avec étonnement s’élancer dans ce qu’ils appellent leur philosophie ; c’est une espèce de folie douce, aimable, et surtout sans fiel. Je vais citer, non pas tout à fait de mémoire, mais sur des notes rapides, un ouvrage qui, quoique fait dans un sens d’opposition, montre bien, même par les admirations de l’auteur, l’esprit militaire dans tout son excès : c’est le Voyage en Autriche, par M. Cadet-Gassicourt, en 1809. Qu’eût dit le noble et généreux Desaix, s’il eût vu le pur héroïsme de 95 conduire à cet exécrable égoïsme ?

Deux amis se trouvent ensemble à une batterie, à la bataille de Talavera, l’un comme capitaine commandant, l’autre