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DE L’AMOUR

La déclaration ci-dessus ressemble beaucoup à ce qu’elle me dit : j’ai conservé le souvenir de ses expressions. Peu de jours après, je vis une des personnes qui avaient reçu la même confidence. Je la priai de chercher à s’en rappeler les termes ; elle me répéta exactement la version que j’avais entendue, ce qui me fit rire.

Après sa confession, Félicie me dit, en me tendant la main, qu’elle comptait sur ma discrétion ; que je devais être avec Weilberg comme par le passé, et faire semblant de ne m’apercevoir de rien. « La vertu sauvage de cet homme sublime lui faisait peur. » Quand il la quittait, elle craignait toujours de ne plus le revoir ; elle craignait que, par une résolution inopinée, il ne s’embarquât tout à coup pour retourner en Suède. Moi, je lui promis sur notre conversation le plus inviolable secret.

Cependant tous les amis de la famille trouvaient indigne que ce pauvre Weilberg eût séduit une jeune femme dans la maison de laquelle il avait presque reçu l’hospitalité, dont le mari lui avait rendu mille services, et qui avait jusque-là marché très droit. Je le prévins du sot rôle qu’on lui faisait jouer. Il m’embrassa en me remerciant de l’avis, et me dit qu’il ne remettrait plus les pieds dans cette maison. C’est lui