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complètement dépourvu d’esprit. Le mari pourtant avait eu beaucoup de succès dans ses études à l’École polytechnique, où je l’avais connu, et l’on avait bien fait mousser son mérite dans la société où était élevée Félicie, pour lui dérober sa bêtise qui s’étend à tout, hors le talent de conduire supérieurement ses mines et ses fonderies.

Le mari la fêta de son mieux, ce qui veut dire ici très bien ; mais il avait affaire a à un être glacé auquel rien ne faisait. Cette espèce de reconnaissance tendre que les maris inspirent ordinairement aux filles les plus indifférentes ne dura pas huit jours chez elle.

Seulement, à vivre ainsi avec lui, elle s’aperçut bientôt qu’on lui avait donné une bête pour le tête-à-tête, et, ce qui est bien plus affreux, une bête quelquefois ridicule dans le monde. Elle trouva plus que compensé par là le plaisir d’avoir épousé un homme fort riche et de recevoir souvent des compliments sur le mérite de son mari.

Alors elle le prit en déplaisance.

Le mari, qui n’était pas si bien né qu’elle, crut qu’elle faisait la duchesse. Il s’éloigna aussitôt de son côté. Cependant, comme c’était un homme excessivement occupé et très peu difficile, et comme il n’y avait rien de plus commode pour lui que sa