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suis en réalité et la manière dont me voit cet aimable jeune homme qu’entre une petite branche de charmille desséchée et la jolie aigrette de diamants que ces mineurs m’ont offerte.

— Madame, le jeune officier découvre en vous des qualités que nous, vos anciens amis, nous n’avons jamais vues. Nous ne saurions apercevoir, par exemple, un air de bonté tendre et compatissante. Comme ce jeune homme est Allemand, la première qualité d’une femme, à ses yeux, est la bonté, et sur-le-champ, il aperçoit dans vos traits l’expression de la bonté. S’il était Anglais, il verrait en vous l’air aristocratique et lady like[1] d’une duchesse, mais, s’il était moi, il vous verrait telle que vous êtes, parce que depuis longtemps, et pour mon malheur, je ne puis rien me figurer de plus séduisant.

— Ah ! j’entends, dit Ghita ; au moment où vous commencez à vous occuper d’une femme, vous ne la voyez plus telle qu’elle est réellement, mais telle qu’il vous convient qu’elle soit. Vous comparez les illusions favorables que produit ce commencement d’intérêt à ces jolis diamants qui cachent la branche de charmille effeuillée par l’hiver, et qui ne sont aperçus, remarquez-le

  1. L’air grande dame.