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ton et de toute nouveauté intéressante, en un an de séjour les femmes de tous les autres pays deviennent insupportables.

Il voit les Françaises avec leurs petites grâces[1] tout aimables, séduisantes les trois premiers jours, mais ennuyeuses le quatrième, jour fatal où l’on découvre que toutes ces grâces étudiées d’avance et apprises par cœur sont éternellement les mêmes tous les jours et pour tous.

Il voit les Allemandes si naturelles, au contraire, et se livrant avec tant d’empressement à leur imagination, n’avoir souvent à montrer, avec tout leur naturel, qu’un fond de stérilité, d’insipidité et de tendresse de la bibliothèque bleue. La phrase du comte Almaviva semble faite en Allemagne : « Et l’on est tout étonné, un beau soir, de trouver la satiété où l’on allait chercher le bonheur. »

À Rome, l’étranger ne doit pas oublier que si rien n’est ennuyeux dans les pays où tout est naturel, le mauvais y est plus mauvais qu’ailleurs. Pour ne parler que des hommes[2], on voit paraître ici, dans la société, une espèce de monstres qui se cachent ailleurs. Ce sont des gens également

  1. Outre que l’auteur avait le malheur de n’être pas né à Paris, il y avait très peu vécu.
    (Note de l’éditeur.)
  2. Heu ! male nunc artes miseras hæc secula tractant ;
    Jam tener assuevit munera velle puer.

    Tibul., I, iv.