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93.
L’amour antique.

L’on n’a point imprimé de lettres d’amour posthumes des dames romaines. Pétrone a fait un livre charmant, mais n’a peint que la débauche.

Pour l’amour à Rome, après la Didon[1] et la seconde églogue de Virgile, nous n’avons rien de plus précis que les écrits des trois grands poètes Ovide, Tibulle et Properce.

Or, les élégies de Parny ou la lettre d’Héloïse à Abélard, de Colardeau, sont des peintures bien imparfaites et bien vagues si on les compare à quelques lettres de la Nouvelle-Héloïse, à celles d’une Religieuse portugaise, de Mlle de Lespinasse, de la Sophie de Mirabeau, de Werther, etc.

La poésie avec ses comparaisons obligées, sa mythologie que ne croit pas le poète, sa dignité de style à la Louis XIV, et tout l’attirail de ses ornements appelés poétiques, est bien au-dessous de la prose dès qu’il s’agit de donner une idée claire et précise des mouvements du cœur ; or, dans ce genre, on n’émeut que par la clarté.

  1. Voir le regard de Didon, dans la superbe esquisse de M. Guérin au Luxembourg.