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1o Le véritable honneur ou le désir de ressembler à Bayard, pour être honoré dans le monde et y voir chaque jour notre vanité satisfaite ;

2o L’honneur bête ou le désir de ressembler aux gens de bon ton, du grand monde, de Paris. L’art d’entrer dans un salon, de marquer de l’éloignement à un rival, de se brouiller avec sa maîtresse, etc.

L’honneur bête, d’abord par lui-même comme capable d’être compris par les sots, et ensuite comme s’appliquant à des actions de tous les jours, et même de toutes les heures, est beaucoup plus utile que l’honneur vrai aux plaisirs de notre vanité. On voit des gens très bien reçus dans le monde avec de l’honneur bête sans honneur vrai, et le contraire est impossible.

Le ton du grand monde est :

1o De traiter avec ironie tous les grands intérêts. Rien de plus naturel, autrefois les gens véritablement du grand monde ne pouvaient être profondément affectés par rien ; ils n’en avaient pas le temps. Le séjour à la campagne change cela. D’ailleurs, c’est une position contre nature pour un Français, que de se laisser voir admirant[1], c’est-à-dire inférieur, non

  1. L’admiration de mode, comme Hume vers 1775, ou Franklin en 1784, ne fait pas objection.