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1o A moins qu’il n’ait pas eu le temps de désirer cette femme et de la livrer à son imagination, c’est-à-dire à moins qu’il ne l’ait dans les premiers moments qu’il la désire. C’est le cas du plus grand plaisir physique possible car toute l’âme s’applique encore à voir les beautés sans songer aux obstacles.

2o Ou à moins qu’il ne soit question d’une femme absolument sans conséquence, une jolie femme de chambre, par exemple, une de ces femmes que l’on ne se souvient de désirer que quand on les voit. S’il entre un grain de passion dans le cœur, il entre un grain de fiasco possible.

3o Ou à moins que l’amant n’ait sa maîtresse d’une manière si imprévue, qu’elle ne lui laisse pas le temps de la moindre réflexion.

4o Ou à moins d’un amour dévoué et excessif de la part de la femme, et non senti au même degré par son amant.

Plus un homme est éperdument amoureux, plus grande est la violence qu’il est obligé de se faire pour oser toucher aussi familièrement, et risquer de fâcher un être qui, pour lui, semblable à la Divinité, lui inspire à la fois l’extrême amour et le respect extrême.

Cette crainte-là, suite d’une passion fort tendre, et dans l’amour-goût la mauvaise