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la nuit avec M. le colonel ? — De bon cœur, répond le père, je crois qu’à un tel homme, je prêterais encore ma femme. — Eh bien va, dit la mère à Trineli ; mais sois brave fille, et n’ôte pas ta jupe.... » Au point du jour, Trineli, respectée par l’étranger, se leva vierge : elle arrangea les coussins du lit, prépara du café et de la crème pour son veilleur, et, après que, assise sur le lit, elle eut déjeuné avec lui, elle coupe un petit morceau de son broustpletz (pièce de velours qui couvre le sein). « Tiens, lui dit-elle, conserve ce souvenir d’une nuit heureuse ; je ne l’oublierai jamais ; pourquoi es-tu colonel ? » Et, lui ayant donné un dernier baiser, elle s’enfuit ; il ne put plus la revoir[1]. » Voilà l’excès opposé à nos mœurs françaises et que je suis loin d’approuver.

Je voudrais, si j’étais législateur, qu’on prît, en France comme en Allemagne, l’usage des soirées dansantes. Trois fois par semaine les jeunes filles iraient avec leurs mères à un bal commencé à sept heures, finissant à minuit, et exigeant pour tous frais un violon et des verres d’eau.

  1. Je suis heureux de pouvoir dire avec les paroles d’un autre des faits extraordinaires que j’ai eu l’occasion d’observer. Certainement sans M. de Weiss je n’eusse pas rapporté ce trait de mœurs. J’en ai omis d’aussi caractéristiques à Valence et à Vienne.