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« Une femme allemande qui aurait l’âme de Phi***, avec son esprit, sa figure noble et sensible, le feu qu’elle devait avoir à dix-huit ans (elle en a vingt-sept), étant honnête et pleine de naturel par les mœurs du pays, n’ayant, par la même cause, que la petite dose utile de religion, rendrait sans doute son mari fort heureux. Mais comment se flatter d’être constant auprès de mères de famille si insipides ?

« Mais il était marié, m’a-t-elle répondu ce matin comme je blâmais les quatre ans de silence de l’amant de Corinne, lord Oswald. Elle a veillé jusqu’à trois heures pour lire Corinne ; ce roman lui a donné une profonde émotion, et elle me répond avec sa touchante candeur : Mais il était marié.

« Phi*** a tant de naturel et une sensibilité si naïve que même en ce pays du naturel, elle semble prude aux petits esprits montés sur de petites âmes. Leurs plaisanteries lui font mal au cœur, et elle ne le cache guère.

« Quand elle est en bonne compagnie elle rit comme une folle des plaisanteries les plus gaies. C’est elle qui m’a conté l’histoire de cette jeune princesse de seize ans, depuis si célèbre, qui entreprenait souvent de faire monter dans son appartement l’officier de garde à sa porte. »