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et ensuite de la marier par force à un vieillard ennuyeux[1].

Mais les jeunes filles se marient avec plaisir. — C’est que, dans le système contraint de l’éducation actuelle, l’esclavage qu’elles subissent dans la maison de leur mère est d’un intolérable ennui ; d’ailleurs elles manquent de lumières, enfin c’est le vœu de la nature. Il n’y a qu’un moyen d’obtenir plus de fidélité des femmes dans le mariage, c’est de donner la liberté aux jeunes filles et le divorce aux gens mariés.

Une femme perd toujours dans un premier mariage les plus beaux jours de la jeunesse, et par le divorce elle donne aux sots quelque chose à dire contre elle.

Les jeunes femmes qui ont beaucoup d’amants n’ont que faire du divorce. Les femmes d’un certain âge, qui ont eu

  1. Même les minuties, tout chez nous est comique en ce qui concerne l’éducation des femmes. Par exemple, en 1820, sous le règne de ces mêmes nobles qui ont proscrit le divorce, le ministère envoie à la ville de Laon un buste et une statue de Gabrielle d’Estrées. La statue sera placée sur la place publique, apparemment pour répandre parmi les jeunes filles l’amour des Bourbons et les engager en cas de besoin, à n’être pas cruelles aux rois aimables, et à donner des rejetons à cette illustre famille.
    Mais en revanche le même ministère refuse à la ville de Laon le buste du maréchal Serrurier, brave homme qui n’était pas galant et qui de plus avait grossièrement commencé sa carrière par le métier de simple soldat. (Discours du général Foy, Courrier du 17 juin 1820. Dulaure, dans sa curieuse Histoire de Paris, article : amours de Henri IV.)