Page:Stendhal - De l’amour, II, 1927, éd. Martineau.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme en amour la rencontre d’un être indifférent qui vient de voir ce qu’on aime ; et cet intérêt double tous les mois jusqu’à ce qu’on ait abandonné la conjuration de Fiesque.

Le vrai théâtre des vertus d’une femme, c’est la chambre d’un malade. — Mais vous faites-vous fort d’obtenir de la bonté divine qu’elle redouble la fréquence des maladies pour donner de l’occupation à nos femmes ? C’est raisonner sur l’exception.

D’ailleurs je dis qu’une femme doit occuper chaque jour trois ou quatre heures de loisir, comme les hommes de sens occupent leurs heures de loisir.

Une jeune mère dont le fils a la rougeole ne pourrait pas, quand elle le voudrait, trouver du plaisir à lire le voyage de Volney en Syrie, pas plus que son mari, riche banquier, ne pourrait, au moment d’une faillite, avoir du plaisir à méditer Malthus.

C’est là l’unique manière pour les femmes riches de se distinguer du vulgaire des femmes : la supériorité morale. On a ainsi naturellement d’autres sentiments[1].

Vous voulez faire d’une femme un

  1. Voir mistress Hutchinson refusant d’être utile à sa famille et à son mari qu’elle adorait, en trahissant quelques régicides auprès des ministres du parjure Charles II (tome II, page 284).