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mon terme approche, je ne rencontrerai plus dans ce monde celle que j’aime, et je crains, si je meurs musulman, de ne pas la rencontrer non plus dans l’autre vie. Il se fit chrétien et mourut. Son ami se rendit auprès de la jeune chrétienne qu’il trouva malade. Elle lui dit : Je ne verrai plus mon ami dans ce monde ; mais je veux me retrouver avec lui dans l’autre : ainsi donc je rends témoignage qu’il n’y a d’autre dieu que Dieu, et que Mahommed est le prophète de Dieu. Là-dessus, elle mourut, et que la miséricorde de Dieu soit sur elle•.

Eltemimi raconte qu’il y avait dans la tribu des Arabes de Tagleb, une fille chrétienne fort riche qui aimait un jeune musulman. Elle lui offrit sa fortune et tout ce qu’elle avait de précieux, sans pouvoir parvenir à se faire aimer de lui. Quand elle eut perdu toute espérance, elle donna cent dinars à un artiste pour lui faire une figure du jeune homme qu’elle aimait. L’artiste fit cette figure, et quand la jeune fille l’eut, elle la plaça dans un endroit où elle venait tous les jours. Là, elle commençait par embrasser cette figure, et puis s’asseyait à côté d’elle et passait le reste de la journée à pleurer. Quand le soir était venu, elle saluait la figure et se retirait. Elle fit cela pendant longtemps. Le jeune homme vint