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per à l'ennui quand on n'agit pas, ou un homme d'esprit dont la conversation vous amuse, ou un livre qui plaise. Mais mille causes peuvent éloigner de vous l'homme aimable, et d'ailleurs, ils ne sont pas communs ; le goût de la lecture vous fait trouver partout des causes de plaisir. J'ai souvent pensé que, si les hommes doivent aimer la lecture, les femmes doivent l'adorer. Regarde com­bien les femmes de cinquante ans sont bêtes et s'ennuient à Grenoble. Eh bien, ici, je vais passer ma soirée tous les mardis chez une femme de soixante-deux ans. Il y a beaucoup de gens aimables chez elle, et cependant je ne suis jamais si heureux que quand je suis assis sur son marche­pied à la faire rire par mes observations sur la sagesse humaine. Nous sommes chez elle dix hommes dans ce cas. Quel sort aimes-tu mieux, celui de l'ennuyeuse, médisante, bégueule vieille de Grenoble, ou celui de la femme aimable de Paris ? Je loue le courage que tu te sens de lire Velly et compagnie ; mais il faut mieux t'appliquer ; la raison la voici : j'étais plus instruit que toi quand je le lus et il ne m'en reste rien. Lis tous les ouvrages de Vertot, particulièrement ses Révolu­tions romaines ; lis Plutarque ; si le style d'Amyot te dégoûte, prie notre bon papa