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c'est ce que j'ai fait avant-hier ; ainsi, à compter du 12 messidor, je suis redevenu libre et citoyen.

Quelle idée avez-vous donc sur nos lettres, mon che Mounier ? Est-ce que nous nous écrivons pour faire de l'esprit ou pour nous communiquer franchement ce que nous sentons ?1 Ecrivez-moi avec votre cœur et je serai toujours content. J'ai été charmé de la description de la ville de Rennes. Je vous vois déjà dans une délicieuse petite chambre donnant sur les Thabors, rêvant à la jolie fille du Maine et aux charmantes sœurs qui, Parisiennes et militaires, emporteront, votre cœur d'assaut. Vous avez beau me plaisanter sur mes amours passagers, vous, monsieur le philosophe, tout comme un autre vous serez d'abord entraîné par les femmes vives et légères, Une d'elles, avec un peu de coquetterie, vous persua­dera facilement que vous l'adorez et qu'elle vous aime un peu. Vous en serez fou pendant deux mois, vous croirez avoir trouvé cette femme unique qui seule

1. Les lettres de Beyle à Édouard Mounier, qu'il n'aime pas, ne sont en réalité écrites que pour Victorine Mounier qui sans doute ne les connut jamais. C'est pour elle qu'il les fait légères et brillantes, pleines de sous-entendus, que seule elle doit entendre, et remplies d'allusions qui doivent enflammer son cœur et son imagination et, au besoin, exciter sa jalousie.