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prendre ; ma raison me dit, malgré moi, que tu pourrais m'être supérieur ; je te fiais.

Serrons-nous, ma chère amie, nous qui nous aimons et que rien ne peut dis­joindre ; laissons errer les hommes à leur gré : il y en a bien peu d'estimables et encore moins d'aimables. Tâchons de nous arranger de manière à passer notre vie ensemble ; mais pourquoi, en attendant ces heureux moments où, libres comme l'air, ce qui est un grand bien, nous jouirons du bien, encore plus grand, de loger dans la même maison, refuses-tu de nous unir le plus possible en nous écrivant souvent ? As-tu encore la crainte puérile et tant de fois démentie de m'écrire des lettres qui ne m'intéressent pas ?

Je te crois plutôt paresseuse, je ne dis pas amoureuse, la rime le dit pourtant. Dis-moi quelque chose de ce que tu fais ; je ne dis pas tout, quoique je le désirasse bien : mais ce serait peut-être le moyen de ne rien avoir. Le sort qui fait souvent dépendre le bonheur d'un homme de la volonté d'un autre, quisonge plus àépierrer ou à planter un champ qu'à donner de bons ordres, me fera aller à Grenoble le plus tard que je pourrai, mais, enfin, en messidor au plus tôt. Je volerais avec enthousiasme dans ce beau pays si je