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la voyant passer avec son enfant sur le dos en avait pitié, parce qu'elle se disait : « Un jour, je puis en être réduite là ; » lors­qu'elle entendait sa chanson, la pitié ces­sait : «. jamais je n'aurai de mauvaises mœurs ; cette femme en a sans doute, sa chanson le prouve, et ce sont sans doute ses mauvaises mœurs qui l'ont mise là. »

Remarque combien la tête influe sur le cœur : mille personnes dans Paris, en pas­sant là, pouvaient avoir les mêmes senti­ments ; il n'y en a pas quatre peut-être qui les eussent analysés. Beaucoup ne 1 auraient pas pu ; la majeure partie, du reste, aurait chassé cette image impor­tune. Tu vois là, en deuxième lieu, l'in­fluence de la léle sur le cœur ; cette femme désirait la charité, sa pantomime était bonne, elle avait bien fait de mettre son enfant sur son dos, mais la chanson était mal choisie ; il fallait une romance triste ; voilà donc un défaut d'esprit qui paralyse tout le reste.

Tu te souviens sans doute que je t'ai écrit que l'homme était composé de trois parties : 1° le corps ; 2° l'âme ou toutes les passions ; 3° la tête ou le centre des com­binaisons. Etudie-le d'après cette dis­tinction, c'est la plus commode ; observe dans chaque individu l'âme et la tête. Dans le paysan, par exemple, tu trouveras