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dans tout son livre. Je vois à cette heure qu'il s'est bien trompé. Peut-être même tout ce qu'il y a de bon dans son livre est-il copié de La Rochefoucauld, Duelos, Vauvenargues, Hobbes et Locke. Hobbes était le plus grand de tous ceux-là ; il était Anglais et écrivait en 1640.

A propos d'anglais, mon papa dit que tu veux l'apprendre : je voudrais bien pouvoir te céder ce que j'en sais ; ce sont de tristes raisonneurs que ces Anglais ; je ne connais pas de gens plus bavards et plus froids. Ils n'ont produit qu'un grand homme et un fou. Le grand homme est Shakspeare ; le fou, Miîton. Il n'y a que des morceaux de beaux dans le second, et M. Letourneur a donné une excellente traduction du premier, homme vraiment divin.

Apprends-moi l'italien : « Mais il n'y a point de maîtres. » — Apprends-le toute seule. Apprends cette belle langue où il y a Dante, Boccace, Arioste, Tasse, Alfieri, Goldoni, Metastasio, Machiavelli et tant d'autres. De tous ceux-là, il n'y a que Dante et Boccace passablement tra­duits ; encore Rivaroln'a traduit que le tiers du sublime Dante. Cherche l'histoire d'Ugo-lin, chant XXXIII ; voilà la plus terrible poésie qui existe : le divin Homère même n'a rien de semblable. C'est là le sublime