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et par occasion, j'ai visité les divines îles Borromées ; elles sont trois : Isola Bella, Isola Madre, Isola dei Pescatori. Imagine-toi un lac demi-circulaire, long d'une quinzaine de lieues, la partie tournée vers Milan, ou plutôt vers Buffatora, est environnée de coteaux charmants. Le Tessin, rivière superbe, sort de cette par­tie du lac ; à mesure que l'on s'avance sur ces ondes tranquilles, les coteaux deviennent montagnes, et la partie du lac, voisine de la Suisse, est environnée de rochers sourcilleux qui rappellent le Bernard1. Ces bords sont tranquilles ; peu de maisons, point de culture, nulle trace de ces treilles détestables, de ces palissades qui défigurent les célèbres bords du Léman. Ici, la nature se montre partout ; de temps en temps, on rencon­tre une petite barquette montée par deux pêcheurs, on marche ainsi une heure et demie. Tout-à-coup on se tourne et on se trouve aux pieds de la forteresse et de la ville d'Arona. Je n'ai jamais vu as­pect plus imposant. Imagine-toi un es­carpement comme celui de la porte de France à Grenoble. d'un côté ; de l'autre, une pente assez douce, au sommet, un

1. Il faut lire sans doute le Saint-Eynard, montagne au nord de Grenoble et qui est en bordure extrême du massif de la Chartreuse, — ou bien le Mont Saint-Bernard.