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vois sans cesse, je lui parle quelquefois, mais elle ne me répond pas, et, comme un enfant après avoir embrassé une pou­pée, je pleure de ce qu'elle ne me rend pas mes baisers. Je vois qu'actuellement il n'y a plus que de grandes choses qui puissent me distraire de cet état affreux de brûler sans cesse pour un être qu'on sait qui n'existe pas, ou qui, s'il existe, par un hasard malheureux ne répond pas à ma passion. L'amour, tel que je l'ai conçu, ne pouvant me rendre heureux, je com­mence depuis quelque temps à aimer la gloire ; je brûle de marcher sur les traces de cette génération de grands hommes qui, constructeurs de la Révolution, ont été dévorés par leur propre ouvrage. N'en étant pas encore là, je prends part aux factions de Rome, ne pouvant faire mieux, et je nourris dans mon cœur l'immortel espoir d'imiter un jour les grands hommes que je ne puis pour le moment qu'admirer. Mais je m'emporte ; mes meilleurs amis me disent : tu es fou. Vous-même vous riez de ces balivernes ; tout ce que je vous demande, c'est d'en rire tout seul.

..... Pour être approuvés,

De semblables projets veulent être achevés.

Je reviens à votre lettre, qui est char-