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Il m'en a bien coûté pour refuser d'aller avec ce bon et grand homme que j'aime tant et qui a tant de confiance en moi ; mais c'est encore un sacrifice fait à la gloire ; il faut un esprit de suite dans la vie.

Que n'es-tu ici, ma bonne Pauline ! tous mes vœux seraient satisfaits : la grande civilisation des grandes villes a fait fuir les plaisirs du cœur. Je trouve ici beau­coup de connaissances ; mais il faut toujours être en scène, avoir toujours de l'esprit, être toujours agréable : la bonne et franche simplicité n'ose plus se montrer, et toutefois, sans simplicité, point de véritable bonheur ; rien de gla­çant comme la dignité.

D'un autre côté, cette ville a mille avantages ; on y voit tous les monuments des arts ; on a un théâtre superbe où on entre en société avec les grands hommes de tous les âges ; on trouve dans le monde plus de bon sens qu'ailleurs, les femmes n'y sont pas, cnmme en province, caillettes et rien que caillettes ; elles y raisonnent très juste. Comme elles sont en société avec les grands hommes de tous les genres, elles prennent des sentiments justes de toute chose et apprécient la Phèdre de Guérin avec autant de finesse qu'une glace de Frascati ; il ne leur manque que le sentiment.