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STENDHAL

foncé. Paul n’a pu lui parler, il sait par le confesseur du couvent que jamais elle n’a eu la moindreidée qu’elle faisait mal en tuant l’inconnu. Elle n’est pas encore revenue de Ja surprise que lui cause la conduite de Fabio ; la découverte que le mort était son frère ne lui semble nullement justifier sa froideur. Quelquefois elle pense qu’à Turin, et avant son retour à Ravenne, il avait cessé de l’aimer.

Rome, 25 mars 1828. Manière d’aller de Paris à Rome. — Quelle est la meilleure manière d’aller de Paris à Rome ? nous demande-t-on de France. D’abord la poste ; mais il faut avoir une calèche construite â Vienne et fort légère. Prenez peu de bagages ; en traversant ces petits Etats soupçonneux, chaque caisse ou malle est une source de vexations à la douane ou à la police. Nous avons fait voyager nos caisses par la voie du roulage, qui nous a bien servis. Toutes les dépenses sont doublées en Italie pour un voyageur que l’on voit arriver en poste, et souvent les brigands n’arrêtent que les voitures en poste, et dédaignent les autres.

On peut prendre la malle-poste jusqu’à Béfort et Bâle, si l’on passe par le nord de la Suisse ; et jusqu’à Pontarlier ou Ferney, si l’on veut arriver directement au Simplon. On prend la malle-poste jusqu’à Lyon ou Grenoble, si l’on passe par le Mont-Cenis ; et enfin jusqu’à Draguignan, si l’on veut éviter les montagnes et entrer en Italie par le beau chemin en corniche, chef-d’œuvre de M. de Chabrol. On arrive de Nice à Pise en passant par Gênes ; cette dernière route est de beaucoup la plus longue ; on trouve, en côtoyant la plus jolie mer du monde, des aspects délicieux. Rien ne ressemble moins à l’Océan.

La plus expéditive, et, suivant moi, l’une des plus jolies routes, commence par quarante-huit heures de malle-poste ; on arrive à Béfort ; une petite voiture conduit à Bâle (douze francs). On peut prendre la diligence pour Lucerne ; on navigue ensuite sur ce lac singulier et dangereux, théâtre des exploits de Guillaume Tell ; on voit le lieu où il repoussa du pied la barque de Gessler. On arrive à Altorff ; c’est