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comme il savait ordonner, que personne dans la Petrella ne s’avisât de parler de Castro et du procès de l’abbesse ; la peine de mort, sans aucune rémission, était placée en perspective du moindre bavardage. Au milieu, des transports d’amitié avec lesquels il reçut Branciforte, il lui demanda de ne point aller à Albano sans lui, et sa façon d’effectuer ce voyage fut de faire occuper la ville par mille de ses gens et de placer une avant-garde de douze cents hommes sur la route de Rome. Qu’on juge de ce que devint le pauvre Jules, lorsque le prince, ayant fait appeler le vieux Scotti, qui vivait encore, dans la maison où il avait placé son quartier-général, le fit monter dans la chambre où il se trouvait avec Branciforte. Dès que les deux amis se furent jetés dans les bras l’un de l’autre :

— Maintenant, pauvre colonel, dit-il à Jules, attends-toi à ce qu’il y a de pis.

Sur quoi il souffla la chandelle et sortit en enfermant à clé les deux amis.

Le lendemain, Jules, qui ne voulut pas sortir de sa chambre, envoya demander au prince la permission de retourner à la Petrella, et de ne pas le voir de quelques jours. Mais on vint lui rapporter que le prince avait disparu, ainsi que ses troupes. Dans la nuit, il avait appris la mort de Grégoire XIII ; il avait oublié son ami Jules et courait la campagne. Il n’était resté autour de Jules qu’une trentaine d’hommes appartenant à l’ancienne compagnie de Ranuce. L’on sait assez qu’en ce temps-là, pendant le siège vacant, les lois étaient muettes, chacun songeait à satisfaire ses passions, et il n’y avait de force