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homme puissant ; peut-être dans un moment de jalousie avait-elle tué son amant ? Vanina ne pouvait voir une cause vulgaire à son malheur. L’inconnue lui dit qu’elle avait reçu une blessure dans l’épaule, qui avait pénétré jusqu’à la poitrine et la faisait beaucoup souffrir. Souvent elle se trouvait la bouche pleine de sang.

— Et vous n’avez pas de chirurgien ! s’écria Vanina.

— Vous savez qu’à Rome, dit l’inconnue, les chirurgiens doivent à la police un rapport exact de toutes les blessures qu’ils soignent. Le prince daigne lui-même serrer mes blessures avec le linge que vous voyez.

L’inconnue évitait avec une grâce parfaite de s’apitoyer sur son accident ; Vanina l’aimait à la folie. Une chose pourtant étonna beaucoup la jeune princesse, c’est qu’au milieu d’une conversation assurément fort sérieuse l’inconnue eut beaucoup de peine à supprimer une envie subite de rire.

— Je serais heureuse, lui dit Vanina, de savoir votre nom.

— On m’appelle Clémentine.

— Eh bien ! chère Clémentine, demain à cinq heures je viendrai vous voir.

Le lendemain Vanina trouva sa nouvelle amie fort mal.