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façon imposante et qui laissa dans tous les cœurs de la crainte et de la tristesse. Il semblait que la pauvre fille vînt d’être à jamais séparée des vivants.

Au grand déplaisir des belles dames de la cour de Naples, la cérémonie de la confrontation ne dura qu’un instant. Jamais la jeune Rosalinde, pour parler comme les dames de la cour, n’avait été mieux à son avantage que dans ce simple habit de novice. Elle était aussi belle qu’autrefois quand elle suivait sa belle-mère, la princesse de Bissignano, aux bals de la cour, et sa physionomie était bien plus touchante : elle avait beaucoup maigri et pâli.

On l’entendit à peine quand, après un Veni creator de la composition de Pergolèse, chanté par toutes les voix du couvent, Scolastique, ivre d’amour et de bonheur en revoyant son ami, qu’elle n’avait point aperçu depuis près d’un an, prononça ces mots :

— Je ne connais point monsieur, je ne l’ai jamais vu.

Le ministre de la police se montra furieux en entendant ce mot et en voyant tomber ce voile, ce qui terminait d’une façon si brusque et en quelque sorte ridicule pour lui le grand spectacle qu’il avait voulu donner à la cour. Avant de quitter le couvent,