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la condamner à quelque peine légère.

L’abbesse eut beaucoup de peine à ranger les Anciennes à son avis ; mais enfin sa naissance, et surtout ses relations à la cour étaient tellement supérieures aux leurs qu’elles avaient été obligées de céder. Et l’abbesse pensait que la séance du tribunal ne durerait qu’un instant. Mais il en fut tout autrement.

Scolastique ayant récité ses prières à genoux devant le tribunal, comme c’est l’usage, n’ajouta que ce peu de paroles :

— Je ne me regarde point comme une religieuse. J’ai connu ce jeune homme dans le monde ; quoique fort pauvres l’un et l’autre, nous avons le projet de nous marier.

Ce mot, offensant la base du credo du couvent, était le plus grand crime que l’on pût prononcer dans le noble couvent de San Petito.

— Mais le nom ! le nom du jeune homme ! s’écria l’abbesse, interrompant avec impatience le discours qu’elle supposait que Scolastique allait prononcer en faveur du mariage.

Scolastique répondit :

— Vous ne saurez jamais ce nom. Je ne nuirai jamais par mes paroles à l’homme qui doit être mon époux.

En effet, quelques instances que pussent faire l’abbesse et les Anciennes, jamais la