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mettaient de regarder longuement Rosalinde, ils prenaient l’expression de la mélancolie, et même un observateur délicat eût pu conclure qu’il avait un caractère faible et incertain, quoique dévoué jusqu’à la folie. Ce trait était assez difficile à deviner, ses larges sourcils souvent rapprochés amortissaient l’éclat et la douceur de ses yeux bleus.

Le roi, qui ne manquait point de finesse quand son cœur était pris, remarqua fort bien que les yeux de Rosalinde, dans les moments où ils espéraient n’être pas observés par sa belle-mère, qu’elle craignait beaucoup, se fixaient avec complaisance sur les beaux cheveux de Gennarino. Elle n’osait pas s’arrêter de même sur ses yeux bleus, elle eût craint d’être surprise dans cette singulière occupation.

Le roi eut la magnanimité de n’être pas jaloux de Gennarino ; peut-être aussi croyait-il qu’un roi jeune, généreux et victorieux ne doit pas craindre de rivaux. Un observateur délicat n’eût pas loué avant tout cette beauté parfaite des plus belles médailles siciliennes que l’on admirait généralement dans Rosalinde, elle avait plutôt un de ces visages qu’on n’oublie jamais. On pouvait dire que son âme éclatait sur son front, dans les contours délicats de la bouche la plus touchante.