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y répondit avec un feu et un esprit charmants. Le comte voyait dans ses yeux tout l’étonnement qu’avait cette jeune fille de vingt ans en voyant de telles absurdités dans la bouche d’un homme raisonnable en apparence.

Le comte prit congé de Félize, fit appeler l’abbesse, à laquelle il donna de sages avis, annonça au prince que les troubles du couvent de Sainte Riparata étaient apaisés, reçut force compliments pour sa sagesse profonde et enfin retourna à la culture de ses terres. « Il y a pourtant », se disait-il quelquefois, « une fille de vingt ans et qui passerait peut-être pour la plus belle personne de la ville, si elle vivait dans le monde, et qui ne raisonne pas tout à fait comme une poupée ».

Mais de grands événements eurent lieu dans le couvent. Toutes les religieuses ne raisonnaient pas aussi nettement que Félize, mais la plupart de celles qui étaient jeunes s’ennuyaient mortellement. Leur unique consolation était de dessiner des caricatures et de faire des sonnets satiriques sur un prince qui, après avoir été vingt-cinq ans cardinal, ne trouvait rien de mieux à faire, en arrivant au trône, que de ne plus voir sa maîtresse et de la charger, en qualité d’abbesse, de vexer de pauvres jeunes filles jetées dans