Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/111

Cette page a été validée par deux contributeurs.

une clef du cabinet de mon oncle ; j’ai vu par les papiers que j’y ai trouvés qu’une congrégation (ou commission), composée des cardinaux et des prélats les plus en crédit, s’assemble dans le plus grand secret, et délibère sur la question de savoir s’il convient de juger ces carbonari à Ravenne ou à Rome. Les neuf carbonari pris à Forli, et leur chef, un nommé Missirilli, qui a eu la sottise de se rendre, sont en ce moment détenus au château de San Leo[1].

À ce mot de sottise, Vanina pinça le prince de toute sa force.

— Je veux moi-même, lui dit-elle, voir les papiers officiels et entrer avec vous dans le cabinet de votre oncle ; vous aurez mal lu.

À ces mots, don Livio frémit ; Vanina lui demandait une chose presque impossible ; mais le génie bizarre de cette jeune fille redoublait son amour. Peu de jours après, Vanina, déguisée en homme et portant un joli petit habit à la livrée de la casa Savelli, put passer une demi-heure au milieu des papiers les plus secrets du ministre de la police. Elle eut un mouvement de vif bonheur, lorsqu’elle découvrit le rapport journalier du prévenu Pietro

  1. Près de Rimini en Romagne. C’est dans ce château que périt le fameux Cagliostro ; on dit dans le pays qu’il y fut étouffé.