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avait été achetée. Si cette famille puissante comptait un jeune homme dans son sein, il se mettait à la tête de ces soldats improvisés.

Cet état de la civilisation fait gémir la morale, j’en conviens ; de nos jours on a le duel, l’ennui, et les juges ne se vendent pas ; mais ces usages du seizième siècle étaient merveilleusement propres à créer des hommes dignes de ce nom.

Beaucoup d’historiens, loués encore aujourd’hui par la littérature routinière des académies, ont cherché à dissimuler cet état de choses, qui, vers 1550, forma de si grands caractères. De leur temps, leurs prudents mensonges furent récompensés par tous les honneurs dont pouvaient disposer les Médicis de Florence, les d’Este de Ferrare, les vice-rois de Naples, etc. Un pauvre historien, nommé Gianone, a voulu soulever un coin du voile mais, comme il n’a osé dire qu’une très petite partie de la vérité, et encore en employant des formes dubitatives et obscures, il est resté fort ennuyeux, ce qui ne l’a pas empêché de mourir en prison à quatre-vingt-deux ans, le 7 mars 1758.

La première chose à faire, lorsque l’on veut connaître l’histoire d’Italie, c’est donc de ne point lire les auteurs généralement approuvés ; nulle part on n’a