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Dès le milieu du XVIe siècle, la vanité, le désir de parestre, comme dit le baron de Fœneste, a jeté en France un voile épais sur les actions des hommes et surtout sur les motifs de ces actions. La vanité n’est pas de la même nature en Italie, c’est ce dont j’ai l’honneur de donner ma parole d’honneur au lecteur ; elle a une action plus faible. En général, on ne pense au voisin que pour le haïr ou s’en méfier ; il n’y a d’exception tout au plus que pour trois ou quatre cérémonies par an, et alors chaque homme qui donne une fête contraint mathématiquement, pour ainsi dire, l’approbation de son voisin. Il n’y a pas de nuances fugitives, aperçues et saisies au vol, à chaque quart d’heure de la vie, avec une inquiétude mortelle. On ne voit pas de ces faces inquiètes et maigres, transpercées par les anxiétés d’une vanité toujours souffrante, de ces visages à la Viennet (député de l’Hérault en 1833).

Cette vanité d’Italie, tellement différente, tellement plus faible que la nôtre, est ce qui m’a engagé à faire transcrire les bavardages qui suivent. Ma préférence semblerait bien baroque à ceux des Français, mes contemporains, qui sont accoutumés à chercher du plaisir littéraire et la peinture du cœur humain dans les œuvres de MM. Villemain, Delavigne…