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La jeune fille, dans les premiers moments ne pouvait même trouver des forces pour s’habiller. Elle jetait des cris perçants et continuels, et se livrait sans retenue au plus affreux désespoir[1].

— Comment est-il possible, ah ! Dieu ! s’écriait-elle, qu’ainsi à l’improviste je doive mourir ?

Lucrèce Petroni, au contraire, ne dit rien que de fort convenable ; d’abord elle pria à genoux, puis exhorta tranquillement sa fille à venir avec elle à la chapelle, où elles devaient toutes deux se préparer à ce grand passage de la vie à la mort.

Ce mot rendit toute sa tranquillité à Béatrix ; autant elle avait montré d’extravagance et d’emportement d’abord, autant elle fut sage et raisonnable dès que sa belle-mère eut rappelé cette grande âme à elle-même. Dès ce moment elle a été un miroir de constance que Rome entière a admiré.

Elle a demandé un notaire pour faire son testament, ce qui lui a été accordé. Elle a prescrit que son corps fût porté à Saint-Pierre in Montorio[2] ; elle a laissé

  1. En 1833, une jeune fille de cette force d’âme serait toute dignité et songerait à imiter Marie Stuart. Pour avoir la nature, il faut aller en Italie et à l’année 1599. (Note de Stendhal sur le manuscrit italien.)
  2. Le 12 mai 1833, j’ai cherché en vain une inscription sur les dalles près de l’autel. Les moines m’ont assuré que le corps de la pauvre Béatrix est près de l’autel, mais on ignore le lieu précis. (Note de Stendhal sur le manuscrit italien.)