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tion à Béatrix Cenci en la suspendant par les cheveux[1]).

Pendant qu’elle était attachée à la corde, ce nouveau juge fit paraître devant Béatrix sa belle-mère et ses frères. Aussitôt que Giacomo et la signora Lucrèce la virent :

— Le péché est commis, lui crièrent-ils ; il faut faire aussi la pénitence, et ne pas se laisser déchirer le corps par une vaine obstination.

— Donc vous voulez couvrir de honte notre maison, répondit la jeune fille, et mourir avec ignominie ? Vous êtes dans une grande erreur ; mais, puisque vous le voulez, qu’il en soit ainsi.

Et, s’étant tournée vers les sbires :

— Détachez-moi, leur dit-elle, et qu’on me lise l’interrogatoire de ma mère, j’approuverai ce qui doit être approuvé, et je nierai ce qui doit être nié.

Ainsi fut fait ; elle avoua tout ce qui était vrai[2]. Aussitôt on ôta les chaînes à tous, et parce qu’il y avait cinq mois qu’elle n’avait vu ses frères, elle voulut dîner avec

  1. Voir le traité de Suppliciis du célèbre Farinacci, jurisconsulte contemporain. Il y a des détails horribles dont notre sensibilité du dix-neuvième siècle ne supporterait pas la lecture et que supporta fort bien une jeune Romaine âgée de seize ans et abandonnée par son amant.
  2. On trouve dans Farinacci plusieurs passages des aveux de Béatrix ; ils me semblent d’une simplicité touchante.