à braver les opinions qui lui semblent à lui-même justes et raisonnables.
Ce passage devait être fort difficile chez les anciens, et ce n’est guère que sous les empereurs romains, et après Tibère et Caprée, que l’on trouve des libertins qui aiment la corruption pour elle-même, c’est-à-dire pour le plaisir de braver les opinions raisonnables de leurs contemporains.
Ainsi c’est à la religion chrétienne que j’attribue la possibilité du rôle satanique de don Juan. C’est sans doute cette religion qui enseigna au monde qu’un pauvre esclave, qu’un gladiateur avait une âme absolument égale en faculté à celle de César lui-même ; ainsi, il faut la remercier de l’apparition des sentiments délicats ; je ne doute pas, au reste, que tôt ou tard ces sentiments ne se fussent fait jour dans le sein des peuples. L’Énéide est déjà bien plus tendre que l’Iliade.
La théorie de Jésus était celle des philosophes arabes ses contemporains ; la seule chose nouvelle qui se soit introduite dans le monde à la suite des principes prêchés par saint Paul, c’est un corps de prêtres absolument séparé du reste des citoyens et même ayant des intérêts opposés[1].
Ce corps fit son unique affaire de culti-
- ↑ Voir Montesquieu Politique des Romains dans la religion.