le procès qui fut dressé un an plus tard, une foule de religieuses, entendues comme témoins, rapportent que l’évêque multipliait le plus possible ses visites au couvent, disant souvent à leur abbesse : « Ailleurs je commande, et, je l’avoue à ma honte, j’y trouve quelque plaisir ; auprès de vous j’obéis comme un esclave, mais avec un plaisir qui surpasse de bien loin celui de commander ailleurs. Je me trouve sous l’influence d’un être supérieur ; quand je l’essayerais, je ne pourrais avoir d’autre volonté que la sienne, et j’aimerais mieux me voir pour une éternité le dernier de ses esclaves que d’être roi loin de ses yeux. »
Les témoins rapportent qu’au milieu de ces phrases élégantes souvent l’abbesse lui ordonnait de se taire, et en des termes durs et qui montraient le mépris.
— À vrai dire, continue un autre témoin, madame le traitait comme un domestique ; dans ces cas-là, le pauvre évêque baissait les yeux, se mettait à pleurer, mais ne s’en allait point. Il trouvait tous les jours de nouveaux prétextes pour reparaître au couvent, ce qui scandalisait fort les confesseurs des religieuses et les ennemies de l’abbesse. Mais madame l’abbesse était vivement défendue par la prieure, son amie intime, et qui, sous ses ordres immédiats, exerçait le gouvernement intérieur.