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la ville, et se trouva ainsi à la tête de seize hommes déterminés ; deux étaient déguisés en domestiques, ils avaient pris une grande blouse de toile noire pour cacher leurs giacco (cottes de mailles), et leurs bonnets n’avaient pas de plumes.

À minuit et demi, Jules, qui avait pris pour lui le rôle de courrier, arriva au galop à la porte du couvent, faisant grand bruit et criant qu’on ouvrît sans délai à un courrier envoyé par le cardinal. Il vit avec plaisir que les soldats qui lui répondaient par la petite fenêtre, à côté de la première porte, étaient plus qu’à demi ivres. Suivant l’usage, il donna son nom sur un morceau de papier ; un soldat alla porter ce nom à la tourière, qui avait la clef de la seconde porte, et devait réveiller l’abbesse dans les grandes occasions. La réponse se fit attendre trois mortels quarts d’heure ; pendant ce temps, Jules eut beaucoup de peine à maintenir sa troupe dans le silence : quelques bourgeois commençaient même à ouvrir timidement leurs fenêtres, lorsqu’enfin arriva la réponse favorable de l’abbesse. Jules entra dans le corps de garde, au moyen d’une échelle de cinq ou six pieds de longueur, qu’on lui tendit de la petite fenêtre, les bravi du couvent ne voulant pas se donner la peine d’ouvrir la grande porte, il monta, suivi des deux sol-