Page:Stendhal - Armance, Lévy, 1877.djvu/226

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Puisque vous voulez finir en homme, dit M. Duquerrel, il y a deux à parier contre un que dans trois jours vous ne souffrirez plus ; si vous avez à vous réconcilier avec le ciel, c’est le moment. Octave resta pensif après cette déclaration ; mais bientôt un sentiment de joie et un sourire très-marqué succédèrent à ses réflexions. L’excellent Duquerrel fut alarmé de cette joie qu’il prit pour un commencement de délire.


XXIII


Tu sei un niente, o morte ! Ma sarebbe mai dopo sceso il primo gradino della mia tomba, che mi verrebbe dato di veder la vita come ella è realmente ?
Guasco.


Jusqu’à ce moment, Armance n’avait jamais vu son cousin qu’en présence de sa mère. Ce jour-là, après la sortie du chirurgien, madame de Malivert crut apercevoir dans les yeux d’Octave une force inusitée et le désir de parler à mademoiselle de Zohiloff. Elle pria sa jeune parente de la remplacer un instant auprès de son fils, pendant qu’elle irait écrire dans la pièce voisine un mot indispensable.

Octave suivit sa mère des yeux ; dès qu’il ne la vit plus : Chère Armance, dit-il, je vais mourir ; ce moment a quelques privilèges, et vous ne vous offenserez pas de ce que je vais vous dire pour la première fois de ma vie ; je meurs comme j’ai vécu, en vous aimant avec passion ; et la mort m’est douce, parce qu’elle me permet de vous faire cet aveu.