qué, et elle convaincue, dans l’esprit d’Octave, de tous les sentiments bas dont on venait de l’accuser. Grand Dieu, se dit-il, il n’y a donc plus d’exception à la bassesse de sentiments de toute cette société ! Et sous quel prétexte m’imaginerais-je que les autres sociétés sont différentes de celle-ci ? Si l’on ose afficher une telle adoration pour l’argent dans l’un des salons les mieux composés de France, et où chacun ne peut ouvrir l’histoire sans retrouver un héros de son nom, que sera-ce parmi de malheureux marchands millionnaires aujourd’hui, mais dont hier encore le père portait la balle ? Dieu ! que les hommes sont vils !
Octave s’enfuit du salon de madame de Bonnivet ; le monde lui faisait horreur. Il laissa la voiture de famille à son oncle le commandeur et revint à pied chez lui. Il pleuvait à verse ; la pluie lui faisait plaisir. Bientôt il ne s’aperçut plus de l’espèce de tempête qui inondait Paris en cet instant. La seule ressource contre cet avilissement général, pensait-il, serait de trouver une belle âme, non encore avilie par la prétendue sagesse des duchesses d’Ancre, de s’y attacher pour jamais, de ne voir qu’elle, de vivre avec elle et uniquement pour elle et pour son bonheur. Je l’aimerais avec passion… Je l’aimerais ! moi, malheureux !… En ce moment, une voiture, qui débouchait au galop de la rue de Poitiers dans la rue de Bourbon, faillit écraser Octave. La roue de derrière serra fortement sa poitrine et déchira son gilet : il resta immobile ; la vue de la mort lui avait rafraîchi le sang.
Dieu ! que n’ai-je été anéanti ! dit-il en regardant le ciel. Et la pluie qui tombait par torrents ne lui fit point baisser la tête ; cette pluie froide lui faisait du bien. Ce ne fut qu’au bout de quelques minutes qu’il se remit à marcher. Il monta chez lui en courant, changea d’habits, et demanda si sa mère était visible. Comme elle ne l’attendait pas, elle s’était couchée de bonne heure. Seul avec lui-même, tout lui devint