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DE L’AMOUR.

ple plaisir de se promener seule avec son amant à minuit, dans un bois écarté, me donne aussi à rêver toute une nuit[1].

Il dira que ma maîtresse est une prude ; je dirai que la sienne est une fille.


CHAPITRE IV.


Dans une âme parfaitement indifférente — une jeune fille habitant un château isolé au fond d’une campagne — le plus petit étonnement peut amener une petite admiration, et, s’il survient la plus légère espérance, elle fait naître l’amour et la cristallisation.

Dans ce cas, l’amour plaît d’abord comme amusant.

L’étonnement et l’espérance sont puissamment secondés par le besoin d’amour et la mélancolie que l’on a à seize ans. On sait assez que l’inquiétude de cet âge est une soif d’aimer, et le propre de la soif est de n’être pas excessivement difficile sur la nature du breuvage que le hasard lui présente.

Récapitulons les sept époques de l’amour ; ce sont :

1o  L’admiration ;

2o  Quel plaisir, etc. ;

3o  L’espérance ;

4o  L’amour est né ;

    que nous trouvons ici-bas, et qui, dans toutes les situations où la fortune et les révolutions peuvent placer une âme romanesque,

    .....Still prompts the celestial sight.
    For which we wish to live or dare to die
    .
    (Ultima letera di Bianca a sua madre. Forli, 1817.)

  1. C’est pour abréger et pouvoir peindre l’intérieur des âmes que l’auteur rapporte, en employant la formule du je, plusieurs sensations qui lui sont étrangères ; il n’avait rien de personnel qui méritât d’être cité.