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ŒUVRES DE STENDHAL.

heur parfait, qui donne tant de supériorité à la seconde cristallisation sur la première.

L’amant erre sans cesse entre ces trois idées :

1o Elle a toutes les perfections ;

2o Elle m’aime ;

3o Comment faire pour obtenir d’elle la plus grande preuve d’amour possible ?

Le moment le plus déchirant de l’amour jeune encore est celui où il s’aperçoit qu’il a fait un faux raisonnement et qu’il faut détruire tout un pan de cristallisation.

On entre en doute de la cristallisation elle-même.


CHAPITRE III.

DE L’ESPÉRANCE.


Il suffit d’un très-petit degré d’espérance pour causer la naissance de l’amour.

L’espérance peut ensuite manquer au bout de deux ou trois jours, l’amour n’en est pas moins né.

Avec un caractère décidé, téméraire, impétueux, et une imagination développée par les malheurs de la vie.

Le degré d’espérance peut être plus petit.

Elle peut cesser plus tôt, sans tuer l’amour.

Si l’amant a eu des malheurs, s’il a le caractère tendre et pensif, s’il désespère des autres femmes, s’il a une admiration vive pour celle dont il s’agit, aucun plaisir ordinaire ne pourra le distraire de la seconde cristallisation. Il aimera mieux rêver à la chance la plus incertaine de lui plaire un jour que recevoir d’une femme vulgaire tout ce qu’elle peut accorder.

Il aurait besoin qu’à cette époque, et non plus tard, notez