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90 MES MÉMOIRES

— Parce que c’est impossible. Ne me posez pas de questions...

— S’agit-il, insistai-je cependant, d’une grande dame qui, ayant besoin d’une grosse somme, a vendu ce collier et dont le mari menacerait de faire un scandale ?

— Si ce n’était que cela ! répondit-il, je vous aurais tout dit depuis longtemps. Vous m’auriez rendu les perles, je les aurais fait parvenir à la personne, et vous aurais priée d’accepter un autre souvenir.

— Ce collier a donc été volé ? m’écriai-je. Votre ami en était dépositaire. Il a joué, il a perdu et, pour payer sa dette, il vous a demandé de le lui racheter ?

— Non, non... Car, dans ce cas encore, le plus simple serait de le rendre.

— Je vous donne ma parole d’honneur que je n’ai pas le droit de vous dire la vérité. Ecoutez ! Depuis que je sais... ce que je sais, je cherche un moyen d’éviter la catastrophe qui menace mon ami, moi-même et d’autres encore, si tout se découvre... Eh bien, il n’y a qu’un moyen d’éviter tout scandale, c’est que vous gardiez le collier.

Pendant une heure je rangeai des papiers, des notes utiles pour les Mémoires. Mais, avant de quitter l’Elysée, je ne pus m’empêcher de dire :

— Pourquoi ne confiez-vous pas ce collier à quelqu’un autre ?

— Parce que je n’ai confiance en personne autant qu’en vous.

— Pourquoi ne pas le détruire, l’enfouir, le jeter dans la Seine...

— Parce que je pourrais être vu et vous aussi, si vous le faisiez à ma place. D’ailleurs, à quoi bon jeter un collier qui vaut une fortune, quand il se peut que, dans quelques mois, l’orage soit passé ? Car tout s’arrange dans la vie et parfois les miracles arrivent dans la réalité. En tous cas, j’ai payé le collier, il est à vous. Seulement, un hasard extraordinaire, impitoyable, veut que le plus ter-