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MES MÉMOIRES 395

« Après, on me ramena à la campagne. Je tombai malade. J’étais bien malheureuse, va... »

Pendant les jours qui suivirent cette entrevue, je ne dus la vie qu’aux soins dévoués du docteur Raffegeau et du docteur Mignon, et à l’affection dont m’entourèrent leurs femmes et leurs enfants. Le pasteur Arboux et un autre pasteur vinrent me voir.

Quelqu’un me dit : « Votre fille est catholique, ce sont les prêtres qui vous l’ont enlevée, parce que vous êtes protestante ». C’était absurde, mais j’étais si égarée que je me cramponnais à la chance de salut que j’entrevoyais. Je fis venir le curé du Vésinet, et eus plusieurs conversations avec lui. Très loyalement, il me dit : « Il ne faut pas changer de religion, Madame, si vous n’êtes pas convaincue que la religion catholique est la meilleure. Quant à votre fille, aucun prêtre n’a le droit de vous l’enlever ou de l’éloigner de vous... »

Il parlait avec beaucoup de fermeté et de douceur, et me rappelait le saint aumônier de Saint-Lazare.

Me Antony Aubin se mit à me conseiller d’aller à l’étranger, de voyager, dès que je serais assez remise. Je serais partout plus heureuse et surtout plus tranquille qu’en France. Peu à peu, je m’habituai à la pensée d’aller en Angleterre. J’y étais allée naguère et y avais quelques amis. L’Angleterre était un pays de liberté et d’ordre. Je trouverais peut-être, là-bas, le repos dont j’avais tant besoin.

Me Antony Aubin me présenta M. Jacques Dhur, le publiciste bien connu. Je le trouvai un homme sincère, courageux et fort. Il fut entendu que j’écrirais quelques pages de « mon calvaire » pour Le Journal... La somme que je toucherais pour ce travail me serait très utile...