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MES MÉMOIRES 387

pas à l’impasse Ronsin et Chabrier non plus ; la maison est vide...

— C’est bien. Je la trouverai, moi ! Je pars à sa recherche, à l’instant ! m’écriai-je.

— C’est de la folie. Tu es trop faible... on te suivra... il t’arrivera quelque chose... tu ne sais pas ce qui se passe...

Je devinai ce qu’ils voulaient dire. Malgré mon acquittement, on me détestait encore, on me croyait encore coupable ! La foule énorme qui grouillait autour du Palais de Justice la nuit du verdict, en apprenant que j’étais acquittée, avait crié : « A mort !» et « A la guillotine ! » pendant qu’à la Cour d’assises, ceux qui avaient suivi les débats, qui avaient appris à me connaître, qui s’étaient rendu compte de mon innocence, applaudissaient le verdict et criaient leur joie parce que justice avait été faite...

Mais les autres... hélas ! Je compris, à certaines paroles ou plutôt à certaines hésitations, que l’absence de ma fille à la scène finale de mon procès était interprétée, par bien des gens, comme un signe de ma culpabilité !... Que de fois j’ai entendu, moi-même, des gens dire, ne sachant pas qui j’étais : « Si Mme Steinheil avait été vraiment innocente, sa fille se serait précipitée dans ses bras. Au lieu de cela, elle a évité sa mère... La conclusion est claire ! »

Je suppliai mon frère et ma sœur de chercher, de trouver Marthe. « Le photographe » aussi promit de m’aider...

Des journalistes découvrirent où j’étais, et le soir même de mon arrivée à la maison de santé, le docteur Raffegeau me fit déménager et me conduisit, par cent détours, à la maison de M. et de Mme Mignon, où je fus reçue et choyée par trois enfants charmants qui se mirent à m’appeler « Tante Meg » et dont les caresses et l’affection spontanée me réchauffèrent un peu le cœur...

Le lendemain, Me Antony Aubin vint me voir, et je pus enfin le remercier et le féliciter... Il avait