Page:Steinheil - Mes Memoires, 1912.djvu/18

Cette page n’a pas encore été corrigée

14 MES MÉMOIRES

tête toute ronde, prit le bouquet, me hissa dans ses bras et m’embrassa.

Nous faisions souvent de grandes promenades à pied ou à cheval, mon père et moi. Tous deux nous aimions le grand air, l’odeur de la terre, de l’herbe, de la mousse et la voix des arbres... Souvent, il sortait sans moi, mais dès que sonnait l’heure de la récréation, je m’élançais à sa recherche, attachant les rubans de mon grand chapeau de paille tout en courant à travers les bois et les champs. Un instinct sûr me poussait dans la bonne direction... Je l’apercevais enfin et me blottissais dans ses bras, ce qui fut toujours ma façon de le saluer. Nous regagnions ensemble la maison, non sans avoir admiré pour la millième fois nos vieux arbres préférés et nos mares favorites, non sans avoir coupé des fougères et des digitales et fait, au moins une fois, le tour des serres, dont nous connaissions chaque fleur.

Ah ! les heureux jours ! La belle vie ! Comme tout me souriait, me semblait simple et bon... Hélas ! quelques années après, devait commencer la désillusion, les tentations et les faiblesses, les luttes et les douleurs, et ma joie de vivre devait s’écrouler lamentablement, plus tard, dans un drame atroce et retentissant. Pauvre cher père ! Et pauvre moi I...