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164 MES MÉMOIRES

cette photographie et me dire si vous voyez là quelqu’un qui vous rappelle... quelqu’un.

La photographie représentait un groupe de trois personnes. Je crus reconnaître un des trois hommes de la nuit fatale, un individu à longue barbe, aux traits accentués, aux yeux perçants.

— Il y a une très grande ressemblance entre cet individu-ci, dis-je en désignant l’un des personnages du groupe, et l’homme à barbe blond-roux qui, la nuit du 30 au 31 mai, se tenait près la porte du corridor et qui ne parla pas.

L’inspecteur était ravi.

— Nous sommes sur la bonne piste, il n’y a pas d’erreur maintenant ; je me doutais bien que cet homme était un de ceux que nous cherchons ! Nous les tenons !

L’inspecteur se trompait, et moi aussi — je le compris bien des mois après. — L'homme barbu de la photographie n’était pas un des assassins ; c’était M. Burlingham, un journaliste américain, parfaitement honorable, et je parlerai plus loin de l’histoire de cette fausse piste.

Ce n’est que plusieurs semaines après l’incident de cette photographie que j’appris les « faits extraordinaires » que l’inspecteur n’avait pas eu « le droit » de me révéler le 19 juin, les faits qui lui avaient permis de dire que les assassins seraient bientôt pris. Quand le lecteur connaîtra ces faits, il ne pourra pas s’empêcher d’admettre que l’inspecteur avait eu raison de les trouver « extraordinaires » ; ils étaient plus et mieux qu’extraordinaires ; ils étaient concluants. Les voici :

Le dimanche 31 mai 1908, vers dix heures du soir, un contrôleur du Métropolitain, M. Villemant, ramassa dans un compartiment deux documents qui avaient un rapport entre eux.

L’un était une carte de visite au nom de Mme Mazaline, sur laquelle étaient griffonnées au crayon les adresses de deux posticheurs et d’un costumier nommé Guilbert, et une carte d’invitation à l’expo-