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étranger vêtu de flanelle blanche et coiffé d’un liège, breveté contre le soleil. Dès qu’il m’aperçut : « Yambo, Mousoungou ; bonjour l’homme blanc ! » s’écria-t-il d’une voix qu’on put entendre à un kilomètre.

L’effet produit fut électrique ; à peine le mot de mousoungou eut-il été proféré que tout le village fut en rumeur. L’émotion gagna de proche en proche ; et bientôt toutes les bourgades, échelonnées près de la route, furent en proie à la même frénésie.

C’était la première fois qu’un blanc était vu dans cette partie du Gogo. Jusque-là, je m’étais comparé à un marchand de Bagdad arrivant chez les Kurdes, et leur vendant ses soieries de Damas, ou autres objets de luxe ; il fallait maintenant en rabattre et me placer au niveau des singes d’un jardin zoologique.

Le lendemain nous franchîmes les douze kilomètres qui nous séparaient du Mvoumi occidental, village habité par le chef du district. L’abondance et la variété des provisions qui affluèrent dans notre borna justifièrent pleinement tout ce qu’on m’avait dit de la richesse de son territoire.

Le marché dura depuis le matin jusqu’au soir, et me rappela les coutumes commerciales des Abyssiniens et des Gallas. Jusqu’ici, à partir de la côte, les chefs de caravanes sont obligés d’envoyer dans les villages et d’y faire acheter les vivres dont ils ont besoin. Au contraire, dans le Gogo, ce sont les naturels qui viennent trouver les caravanes et qui leur présentent tout ce qu’ils ont d’échangeable.

Le lendemain fut un jour de halte ; nous avions à payer le tribut, dont l’omission eût allumé la guerre.